Konnichiha journal chéri!
Je ne suis plus qu'à quelques minutes du concert qui marquera le milieu de ma tournée en France et le lancement de ma carrière internationale. Rie "Siren" Tanaka n'est pas encore en haut des chartes européens mais ça ne serait tarder en vu des évènements incroyables qui se sont produits cet après-midi. Mon aventure fait déjà la une des JTs et je compte bien profiter de cette mise en lumière pour m'imposer comme la plus grande "Japan Idol" de tous les temps, une super-star planétaire, adulée et admirée par des centaines de millions de fans en folie! Je ne te cache pas qu'il y aura des surprises ce soir, ce sera le concert du siècle! La salle affiche d'hors et déjà complet et les places s'échangent à des prix exorbitants au marché noir. Pour ceux de mes fans qui malheureusement ne pourront être présent, pas de panique, j'ai tout prévu! Ils pourront me suivre en direct sur MTV, la chaîne musicale la plus diffusée au monde. De plus, mes équipes techniques aidé par les membres de mon Fan club s’attellent à l’installation d'écran géant dans la plupart des grandes villes nippones. En attendant, cher journal, restons entre nous car voici le récit complet et véritable de cette journée excitante:
Voilà déjà trois jours que je suis à Paris. La promotion de mon prochain album, les répétitions et le tournage des mes nouveaux clips ne m'ont pas encore laissé le temps d'explorer la ville. Ce matin, Keitaro, mon attaché de presse ne cesse pas de m'importuner. Il vient d'accepter une demande d'interview de la part d'une journaliste du magazine rock "Les Inrockuptibles". Le rendez-vous se fera dans une brasserie, près du quartier des Halles, à 15H. D'habitude je refuse tous interviews les jours de concert. De plus je ne comprend pas en quoi une idole japonaise, de surcroît chanteuse de J-POP et jeune actrice, intéresse soudainement un magasine rock... Quoi qu'il en soit, Keitaro s'est se montrer extrêmement pot de colle quand il le veut et c'est avec l'espoir caché qu'il me lâche un peu les baskets que j'accepte à demi-mots.
Je m'installe à l'arrière d'une voiture banalisée en compagnie de Keitaro. A l'avant, deux malabars armés ont pour mission de nous conduire à bon port puis, le temps de l'interview se colleront à mes basques afin d'assurer ma protection et d'écarter tous "nuisibles". Pour l'occasion, j'ai enfilé une tenue plutôt sobre, mis quelques bijoux, remplis mon sac channel de tout l'attirail nécessaire et indispensable à toutes jeunes filles qui se respectent, et pris le Book de la pochette de mon prochain album. Bref, une photo parle plus que de longs discours:

Sous ce look je pourrai me fondre totalement dans la foule parisienne et rester incognito!
Nous nous retrouvons autour d'une table. Je suis assise en compagnie de mon attaché de presse, dos au mur, près de ce qui semble être une sortie de secours. En face de nous, la journaliste conduit l'interview tout en écrivant sur un petit bloc-note. De type caucasienne, elle doit avoir dans la trentaine, peut-être moins... difficile à dire tant elle est parfaite. C'est une beauté froide, presque surnaturelle. Son petit numéro de charme à totalement subjugué ce pauvre Keitaro, qui béat, commence à lui déballer l'intégralité de mon CV. Quant à moi, il faut beaucoup plus pour m’impressionner, et je reste sur mes gardes, observant la brasserie. La salle principale est pleine, une vingtaine de français buvant et riant discutent près du bar, non loin de là mes gardes du corps tentent en vain de faire comprendre à une petite blonde qu'ils souhaiteraient des bières, un groupe de touristes allemands mange des en-cas à quelques tables de là. Reste deux individus plutôt louches à l'autre bout de la pièce. Ils n’arrêtent pas d'observer notre table tout en tentant de le dissimuler via un jeu d'acteur plutôt pitoyable... Paparazzis, pervers, flics en civil, voleurs, les possibilités sont larges! Peut-être sont-ils de mèches avec cette pseudo journaliste qui d'ailleurs s'est dispensée de se présenter et semble ne rien connaitre de la J-POP et au monde des idoles. De plus elle s'exprime dans un anglais impeccable et soutenue, pas une trace d'accent ou de tournure française, bizarre!
Elle semble tout particulièrement s'intéresser aux dates de sortie et aux ventes surprenantes de mes deux derniers albums qui ont dépassés chacun, contre toute attente, le million d'exemplaire. Je suis inquiète. Et si elle avait fait le lien? Depuis le début, je me suis efforcée à cacher mes capacités, ne les utilisant qu'une fois seule, lors des enregistrements en studio de mes derniers hits... Je me souviens encore des différents tests que j'avais effectué lors d'un baby-sitting du gamin de la voisine:
-En live, mon pouvoir est impressionnant, son effet est perfectible et persistent de longues minutes après son utilisation. Tiens, il faut que je pense à rapporter un petit souvenir de Paris à ce pauvre enfant. A ce qu'on m'a dit depuis ce jour, chaque nuit il fait pipi au lit...
-Pour second test, j'enregistre ma voix et lui fait écouter. L'effet semble fortement amoindri et ne dure pas plus que le temps de la chanson. Tout de suite je vois les répercussions intéressantes que je peux en tirer dans mon travail, de plus c'est beaucoup trop subtile pour que ce soit détectable à la simple écoute d'un de mes CDs, enfin j’espère...
Mon pouls s’accélère alors que je comprend être tombé dans un traquenard. Je suis à quelques mètres de la porte de secours, si je pouvais créer subtilement un mouvement de foule, il me sera alors aisée de l'atteindre pour fuir. J'interromps la journaliste et lui propose de lui chanter une de mes dernières créations. Surprise elle accepte et me demande, les yeux pétillants, si elle peut enregistrer. Me voilà dos au mur, cette femme n'est pas idiote, un refus de ma part pourrait lui mettre la puce à l'oreille sur mon intention de fuite, je ne peux pas refuser! Tout en espérant que les mauvaises conditions d'enregistrement me porte chance, je me met à chanter en japonais une chanson exaltant la richesse et l'avarice qui peut en découler. La foule subjuguée boit chacune de mes paroles. Je vais attaquer la troisième strophe quand, tout d'un coup, une sorte de godzilla miniature rentre avec fracas par la porte de secours dans la pièce et se jette sur moi! Encore sous le choc, il m'attrape par les jambe et me hisse sur son épaule. J'ai à peine le temps d'attraper dans mon sac une liasse de billet de banque. Je l'agite alors frénétiquement sous les yeux de la foule médusée!